[Grand angle] Un diagnostic au plus près des habitants au SICOVAL

Le SICOVAL est une Communauté d’Agglomération regroupant 36 communes du Sud-Est Toulousain. Territoire d’Actions pour un Numérique Inclusif, tout comme les Pyrénées-Atlantiques, il a lancé depuis 2019 une stratégie d’inclusion numérique pour répondre aux besoins des publics les plus éloignés du numérique. Pour mettre en place son plan d’actions de la façon la plus adaptée possible, le SICOVAL mobilise des outils de diagnostic originaux et très en proximité des habitants. Parce que la richesse des territoires est inspirante et que cette approche est complémentaire de celle mise en place dans les Pyrénées-Atlantiques, nous avons demandé à Anne-Claire Dubreuil du SICOVAL de nous présenter leur méthodologie en quelques mots.

Anne-Claire Dubreuil, directrice de projets Transformation Numérique revient sur les outils mobilisés et l’avancée du diagnostic mené par le SICOVAL.

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Anne-Claire Dubreuil | directrice de projets Transformation Numérique

Anne-Claire, peux-tu nous présenter en quelques mots les deux grands outils que vous mobilisez dans le cadre de votre diagnostic et nous parler de l’état d’esprit qui le sous-tend ?

Suite à la signature de la Charte territoire connecté pour un numérique inclusif (TANI), le 14 février 2019, nous avons voulu entrainer tout le territoire et ses acteurs pour trouver collectivement les réponses adaptées à notre collectivité : une communauté d’agglomération péri-urbaine en bordure de Toulouse s’étirant le long du Canal du midi (76 000 habitants et 36 communes). Vous pouvez voir ici le reportage qui évoque les deux  briques principales de notre diagnostic (Enquête usages appétences/ compétences menées sur Borne Arcade et en porte à porte avec La Poste).

Nous sommes une collectivité marquée par la forte présence d’un écosystème d’entreprises tournées vers le numérique (25% de la grande agglo toulousaine) , nous avons donc des liens étroits avec les start-up. En 2018 nous avions expérimenté un jeu développé par Freya Games sur la protection des données personnelles, dédié aux enfants et construit avec eux. Poussé par la puissance des « serious game » pour mobiliser sur des problématiques sociétales, nous avons décidé, au-delà des approches classiques (analyse macro statistique, enquête de terrain auprès des acteurs de la médiation, 50 entretiens conduits auprès des secteurs -privé, public, institutionnel-…, débat citoyen avec le CODEV, commission territoriale avec les élus) de créer un « serious game » sur borne Arcade pour sensibiliser les habitants de neuf communes pilotes aux enjeux de la e-inclusion. Levier d’animation sur les places de village, ce jeu intergénérationnel « c’était mieux après », permet aussi de collecter des données anonymisées sur les appétences et compétences de personnes. Le questionnaire, co-crée avec Savoir*devenir et Freya Games, centré sur les usages, permet d’interpeller les habitants sur leurs pratiques (communication, démarches, information, consommation…) et grâce à des bases de données nominatives et RGPD nous pouvons mobiliser directement les habitants appétents sur des ateliers, et les compétences sur de l’entraide de quartier.

Adossé à cette animation de terrain, nous avons souhaité obtenir une image plus fine et territorialisée des appétences/compétences des habitants. Nous avons, pendant 2 mois, proposé, aux habitants qui avaient donné leur autorisation, le même questionnaire en porte à porte, via les facteurs (tiers de confiance). Nous avions ciblé les ménages modestes et les personnes de plus de 70 ans (découvrir l’opération).

L’esprit à travers ces deux briques centrales de notre diagnostic est d’aller au plus près des besoins des habitants et de créer une dynamique sur le sujet. L’ambition est aussi d’aller chercher les « invisibles » ceux qui ne viennent pas naturellement dans les lieux dédiés par méconnaissance ou crainte.

Vous avez également mobilisé l’indice de fragilité numérique, mis en place grâce au soutien du Fond de transformation pour l’action publique mobilisé dans le cadre de l’IncubO du SGAR Occitanie, en partenariat avec la MedNum et l’Agence nouvelle des solidarités actives, peux-tu nous dire comment vous l’avez utilisé ?

En effet en complément d’une approche fine nous avons voulu disposer d’un outil pédagogique à destination des élus qui nous permette d’avoir une lecture objectivée de la situation à l’échelle de chaque commune (visionner le replay du webinaire dédié). Cette méthode, que nous sommes encore en train de réadapter à notre réalité de territoire avec le soutien de notre Observatoire territorial permet d’avoir un indice de fragilité, sur deux thématiques centrales (l’accès et les compétences). Croisé avec l’offre de services, il permet de révéler de fortes disparités et le besoin de mailler le territoire. C’est un outil de dialogue sur des bases objectives, il ne fait que poser la probabilité d’un risque et n’est donc pas le reflet de la réalité, ce qui nécessite de l’éclairer d’enquêtes qualitatives de terrain.

Avez-vous déjà engagé des actions en lien avec votre diagnostic ?

Ce diagnostic très largement partagé et co-construit, nous a permis de mobiliser les acteurs sur 3 thématiques complémentaires :

  • Conférence territoriale de lutte contre l’illectronisme (volet financement et gouvernance locale)
  • Amorce du réseau des acteurs de la médiation
  • Actions centrées sur le besoin des usagers.

Nous expérimentons aux côtés de quatre autres intercommunalités (Lyon métropole, Eurométropole de Strasbourg, Lille métropole et la CA de La Rochelle) un dispositif local qui, en partenariat avec les Hub, permet de construire un modèle économique/gouvernance locale pour apporter collectivement (privé/public) les fonds nécessaires à la médiation numérique. Cette expérimentation est une des 5 préconisations du Manifeste « Agir face à l’urgence de l’illectronisme ». L’idée est de regrouper localement tous les acteurs concernés par le sujet, de partager le diagnostic, d’établir le plan d’actions et les moyens à associer pour mettre en œuvre un plan local ambitieux autour de la e-inclusion. Un premier état des recommandations va être remis au Secrétariat du numérique en juillet et les expérimentations vont débuter à l’automne. Il y a un enjeu fort à mobiliser le secteur privé sous des formes inédites (mécénat de compétences, don de matériel, fonds financiers…). Nous sommes accompagnés par l’AFNOR et LetsHub dans cette expérimentation.

Les 26 juin et 10 juillet nous avons réuni 40 acteurs de la médiation (MJC, centres sociaux, bibliothèques, indépendants, organisme de formation, aidants…) pour bâtir collectivement avec le soutien de Rhinocc le réseau local de la médiation numérique. A partir des besoins révélés des structures, des attentes des usagers et de leurs rêves insensés, ce réseau local bâtira les réponses adaptées, montera des actions collectives, et portera ses demandes budgétaires au niveau du Contrat territorial.

Enfin, freinées par la Covid 19, les actions prévues en direction des habitants ont dû être arrêtées. En début d’année ont malgré tout eu lieu deux ateliers intergénérationnels (étudiants de L’institut Supérieur des Arts Appliqués de Toulouse et séniors identifiés et invités via l’enquête nominative menée par La Poste. Amorce d’un partenariat qui trouvera sa pleine dimension en 2021. Il est également prévu de mobiliser les personnes compétentes, repérées via le questionnaire, pour accompagner les personnes plus éloignées dans une relation d’entraide et de voisinage. D’autres actions émergeront certainement du réseau local.

Et pour la rentrée ? Une étude de faisabilité d’un dispositif itinérant va être réalisée par un groupe d’étudiants de Sciences Pô Toulouse et du DSA du Lycée Rive Gauche (design de services). L’ambition ? Créer un maillage territorial équitable pour apporter la réponse la plus adaptée aux besoins en prenant appui sur la très grande richesse des acteurs locaux.

Cette approche du diagnostic vous intéresse ? Vous souhaitez avoir plus d’informations ?

Contactez  Anne-Claire.DUBREUIL[a]sicoval.fr

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